Ben moi, je ne la trouve pas si mal, cette réforme... (pas taper)Les commentaires sur ce sujet sont fermés

Ca discute ferme dans toutes les salles des maitres. C’est même parfois assez tendu. Cette réforme des rythmes nous stresse, c’est sûr. On ne sait pas trop à quelle sauce on va être mangés, ni ce que sera notre emploi du temps l’an prochain… De mon côté, je suis un peu déçue que le projet n’aille pas aussi loin qu’on l’avait espéré (notamment pour le rythme de l’année), mais je suis quand même contente. J’ai l’impression qu’on avance quand même dans le bon sens.

Dans mon école, on va proposer au Maire le rythme suivant :

Ecole : 8h45-12h15  puis 13h45-15h30 + 3 heures de classe le mercredi matin.

La fin de l’école  serait donc à 15h30 pour tous. Une fois par semaine, chaque maitre assurera son heure d’APC jusqu’à 16h30 (aide perso, ou étude surveillée, ou projet d’école, ce sera « selon » ). Nous avons fait le point, les trois quart des élèves devraient pouvoir effectivement quitter l’école à 15h30 sans garderie (soit un parent ne travaille pas, soit un parent a des horaires décalés, soit un grand parent est disponible, soit une nounou…). Pour trois quart des élèves, la journée sera VRAIMENT raccourcie.

Franchement, j’ai hâte que ça se fasse.

  • Des après-midis de classe plus courtes, ce sera vraiment mieux, parce que l’après-midi, c’est quand même beaucoup plus compliqué de garder les élèves attentifs et concentrés, non ?
  • 5 matinées au lieu de 4, c’est sûr que cela permettra de mieux étaler les apprentissages compliqués au lieu de les concentrer comme aujourd’hui.
  • Une journée de classe plus courte : même si on m’allongeait ma pause méridienne (ce qui ne m’emballerait pas, cf plus bas), j’aurais quand même l’occasion de corriger une ou deux piles de cahiers supplémentaires et je serais bien contente d’avoir ça en moins à rapporter chez moi le soir.
  • Les programmes en cours de refonte. On parle de les rédiger « comme on avait fait pour ceux de 2002 ». J’aurais bien aimé qu’ils nous les allègent tout de suite-maintenant, ces programmes, mais c’est bien aussi qu’ils ne se précipitent pas et qu’ils prennent le temps de les peaufiner pour nous sortir quelque chose de bien.
  • « Plus de maitres que de classes« , si c’est bien utilisé par les écoles qui vont en profiter, c’est extra ! Imaginez… sur une école, on pourra prendre les 24 élèves de la classe de CP pour les partager pendant une heure sur 2 maitres, par exemple : apprendre la lecture à 12, c’est royal, non ? Et l’heure suivante, on dédoublera, je ne sais pas, moi, la classe de CP d’à côté, ou les maths de CE1, ou……
  • L’aide perso qui devient Activités Pédagogiques Complémentaires : ça n’a l’air de rien, mais cela veut dire qu’on sera + libres de faire ce dont on a envie avec ces heures d’APC. Un club informatique, une chorale d’école, des ateliers de jeux mathématiques, de l’aide aux devoirs… On ne sera pas obligés, on peut continuer l’aide perso si on veut, on est juste plus libres.
  • Du temps hors classe en plus : cela fait longtemps qu’on réclamait d’avoir des heures en plus pour les réunions, les projets, et même les préps… D’un coup, on gagne presque une heure par semaine (avec la transformation des 60 heures d’aide perso en 36 d’APC, on n’a plus qu’une heure d’APC à faire par semaine : on gagne 24 heures par an).

Bref, pour toutes ces raisons je suis contente de cette réforme, je ne ferai pas la grève ni rien de tout ça.

Maintenant, c’est sûr qu’il reste des points d’ombre. Un truc qui m’inquiète c’est la pause méridienne. Cela m’inquiète que tous les ministres nous bassinent sur le fait qu’elle doit être longue alors qu’on voit bien dans nos écoles qu’on récupère des élèves surexcités après deux heures de cour de récréation. La longue pause méridienne, ça va si les élèves rentrent chez eux, ou s’ils peuvent vraiment se reposer, paisiblement. Je ne sais pas… bouquiner, paresser à l’intérieur (quand il fait -10° ou 35° dehors), papoter tranquillement, se reposer… Mais dans les écoles où j’enseigne, la pause méridienne n’a rien d’une pause. C’est plutôt le modèle cocotte-minute-sous-préau… Alors si les mairies décident, pour ne pas dépenser trop de sous, de l’allonger encore, fouyouyou, ça va être dur.

En tous cas, tout ceci est l’occasion de réfléchir avec les mairies, de mettre en place des choses, peut-être faire appel aux parents et aux mamies, de repenser certains temps de classe… que sais-je encore… Il va falloir tâtonner, essayer des dispositifs, corriger le tir. J’imagine que l’année prochaine, notamment, va être brinquebalante (au secours, si on a un poste fractionné ou un poste de remplaçant !), mais bon, on devrait survivre et on en parlera à nos petits enfants dans 30 ans !


Je réponds ci-dessous à quelques inquiétudes lues en commentaire

« La journée des enfants ne sera pas plus courte »

Déjà, dans toutes les écoles qui choisiront une fin de classe à 15h30 ou 15h45, la journée pourra effectivement être plus courte (je rappelle que, contrairement à une rumeur tenace, rien n’oblige les enfants à rester à l’école jusqu’à 16h30). Bien sûr qu’il y a des enfants qui iront à la garderie. Ce seront sans doute à peu de choses près les mêmes qu’aujourd’hui.

Une journée declasse plus courte, cela veut dire que, si on peut (parent qui ne travaille pas, mamie, nounou en périscolaire…) on pourra offrir à l’enfant une journée de collectivité plus courte qu’aujourd’hui. C’est forcément un progrès.

« Toutes les communes n’auront pas les moyens, alors on ne respecte pas l’égalité »

Là aussi, on est en démocratie. Chaque commune fera ses arbitrages budgétaires, selon ses possibilités, aussi selon les attentes des habitants. L’inégalité, elle existe déjà aujourd’hui : il y a des écoles mieux équipées, des écoles avec plus d’Atsems, des écoles qui ont des TBI… Faut-il interdire les TBI sous prétexte d’égalité ? Ou interdire que toutes les classes de maternelle aient une Atsem sous prétexte que ce n’est pas le cas partout ? Cela n’a pas de sens.

Faudrait que les enseignants et les parents marchent ensemble pour une réforme digne de ce nom.

Sur ce coup là, les parents ne sont pas du tout au côté des enseignants. En rejetant tout changement en bloc, en mélangeant toutes les revendications (salaires, effectifs, programmes, 4 jours, 4,5 jours…), en hurlant à l’apocalypse (« privatisation de l’école », « inégalités »), on n’est pas du tout lisibles pour le grand public. 

Voir : Les enseignants ont perdu la bataille de l’opinion.

Je comprends très bien les inquiétudes des enseignants qui se voient imposer 2h45 de pause méridienne, sans activités pour les enfants. Mais qui en a parlé, de ce problème d’allongement de la pause méridienne jusque là ? Qui a su expliquer ce qui n’allait pas ?

On n’a jamais entendu cela, ou alors ultra noyé dans des tas de revendications diverses.

Je vois des enseignants qui s’inquiètent de la qualité de l’offre périscolaire aujourd’hui, ou de sa non gratuité. Avant la réforme des rythmes, quel enseignant s’en était alarmé ? Qui avait fait grève ou manifesté dans la rue pour ça ? D’ailleurs, est-ce à nous, enseignants, de grimper aux rideaux quand la mairie n’offre pas assez d’activités culturelles pendant sa « garderie » ? Ca sonne faux. Le grand public peut peut-être entendre que oui, ce serait bien que les enfants puissent faire piano, poterie, volley gratuitement tous les jours, que ce serait mieux pour l’égalité, mais ils ne nous suivent pas quand on leur dit qu’on rejette la réforme des rythmes pour ça. Elles ont bon dos, les activités périscolaires.

On a réclamé le retour à la semaine de 4,5 jours. On l’a eu.
On a réclamé plus de postes pour le primaire. On les a eus.
On réclame une refonte des programmes. Elle est en cours.
On a réclamé que la priorité budgétaire soit enfin mise sur l’école. C’est le cas.
On a réclamé que la journée d’école soit plus courte. On l’a eue.
On a réclamé d’arrêter de mettre les maitres devant une classe sans formation. C’est acquis aussi.

… et même, on réclame depuis longtemps une revalorisation de nos salaires, de toucher l’ISOE comme nos collègues de collège, et, même si elle n’est pas aussi importante que celle des profs de collège, une prime se profile.

Comment voulez-vous que les parents comprennent un discours du type « stop, on arrête tout tant qu’on n’aura pas des nouveaux programmes » ? ou « stop on arrête tout tant qu’on n’aura pas moins d’élèves dans les classes » ?

2013-1-29 20:58:00
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charivari

Professeur des écoles (directrice d'école) en Sologne

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